dimanche 6 mai 2007

Les pointures SAP manquent à l'appel

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Les pointures SAP manquent à l'appel
Cabinets de conseil et SSII recrutent en 2007 des centaines d'experts SAP. Un casse-tête, car profils pointus et directeurs de grands projets font défaut.

Clarisse Burger , 01 Informatique (n° 1893), le 21/03/2007 à 07h00

Les intégrateurs auraient-ils pris le train en marche ? Ils ne disposent plus aujourd'hui d'assez de spécialistes SAP capables d'appréhender les nouveaux enjeux des entreprises et de diriger des projets qui gagnent en complexité. De fait, il devient de plus en plus difficile de trouver de bons experts SAP sur le marché français. Quant aux managers de projets internationaux, ils se font rares.

La situation devient critique. Car les entreprises réinvestissent dans le PGI. « On est reparti dans une période de croissance de projets SAP », confirme Ludovic Grillet, directeur national SAP chez Capgemini France. En forte croissance, les grands comptes doivent réajuster leur système informatique à l'échelle mondiale jusque dans leurs filiales, et harmoniser leurs processus métier.

Pénurie chez tous les intégrateurs

Les grands cabinets de conseil, qui formaient auparavant ces pointures, n'en « produisent » plus autant. Pendant les années noires 2002 et 2003, les projets autour des PGI ont été gelés, les consultants envoyés sur d'autres missions, et les licences de SAP laissées sur étagère.

Aujourd'hui, les carnets de commandes de ces cabinets explosent : il faut caler du SAP sur de multiples architectures. Et ce, en n'importe quel endroit du monde. Trouver les bons profils relève du casse-tête. IBM, Bearingpoint, Capgemini, Atos Origin, Sopra, ou encore Euriware prévoient de recruter cette année des centaines d'experts afin de répondre à la demande. « Nous manquons de grands patrons SAP, gérant des équipes de 300 consultants, mais aussi de seniors qui construisent les solutions fonctionnelles, et d'architectes techniques pour définir le paysage système autour du PGI », déclare Ludovic Grillet, de chez Capgemini. La SSII recherche ainsi 400 consultants à moyen terme, dont 40 à 50 % de seniors.

De son côté, IBM table sur le recrutement de quelque 300 consultants d'ici à 2008. « Des opérationnels ayant de trois à cinq ans d'expérience, que nous formerons à la technique », annonce Eang Ang Ong, responsable des pratiques SAP chez IBM GBS (Global Business Services) pour la France et l'Afrique du Sud. Cette stratégie de recrutement découle du manque de bons profils techniques. « La pénurie est aussi liée aux nouvelles offres », estime Joël Templier, associé chez X-PM et ancien vice-président du cabinet CSC, chargé des solutions SAP. Hier, étaient recherchés les experts métier sachant paramétrer R3 et modéliser les processus. Aujourd'hui, la mise en place de la nouvelle architecture Netweaver exige aussi de fortes compétences technologiques. « Nous sommes en quête de consultants SAP et NTIC pour réaliser des développements Java et Web » , confirme Ludovic Grillet.

Des indépendants qui tuent la filière manager

Difficile, donc, de trouver ces directeurs de projets au fait des dernières technologies SAP, et capables de piloter de grands projets. On en compterait environ 500 sur le marché français. Soit une dizaine en moyenne par cabinet de conseil ou SSII. Pour sa part, SAP France dispose aujourd'hui d'une trentaine de gourous. « Il en faudrait davantage pour accompagner notre croissance et pallier le turnover », reconnaît Isabelle Saviane, DRH de SAP France. Des profils rares qui sont facturés très chers : autour de 1500 euros la journée !

La pénurie touche aussi les consultants seniors ayant plus de cinq ans d'expérience et une expertise métier (finances, achats, production). Faute d'avoir pu évoluer vers d'autres spécialités ou se former au management, nombre d'entre eux ont quitté les cabinets de conseil pour s'installer à leur compte. Le mouvement s'est d'ailleurs accentué ces dernières années. « C'est un microcosme très actif en France et en Angleterre. Je reçois beaucoup de CV émanant de ces profils, évalués à 450 euros par jour », affirme Joël Templier.

Des candidats prisés par les courtiers en CV de spécialistes SAP. « Ce phénomène freelance a finalement appauvri le marché des managers généralistes de grands projets », analyse, pour sa part, Thierry Bouvier, le directeur chargé des pratiques SAP chez Bearingpoint.

Par ailleurs, des consultants ont rejoint les entreprises utilisatrices afin d'assumer des responsabilités fonctionnelles. De ce fait, ils ont disparu du marché du conseil. Ce qui concourt à la raréfaction des ressources. « Le risque de cette pénurie est d'affecter à des projets des candidats manquant d'expertise », s'alarme la DRH de SAP.

La dispersion impose une formalisation accrue

L'entité française recrute cette année une centaine de seniors et de jeunes diplômés, dotés d'un Master en ressources humaines ou en finance, qui seront formés dès leur arrivée. Elle incite les intégrateurs à faire de même. « Les éditeurs, comme SAP et Oracle, lancent des programmes pour aider les intégrateurs à former des consultants », explique Eric Tirelemont, consultant chez Ineum Consulting.

En effet, il leur faudra des profils pointus en termes de technique, et capables de travailler avec des équipes éloignées sur le plan géographique. Ce qui implique de nouvelles méthodes de travail et une plus grande formalisation des tâches. Et donc davantage de temps ! « On ne forme pas un expert manager en deux ans. La gestion d'un projet ambitieux réclame de six à huit ans d'expérience », juge Thierry Bouvier.

La désaffection pour les filières scientifiques et techniques n'a pas arrangé les choses. Depuis plusieurs années, les jeunes diplômés leur préfèrent les formations fonctionnelles. Comme les autres éditeurs de PGI, SAP se rapproche maintenant des écoles scientifiques, et promeut les doubles cursus. Faire l'impasse sur la technique serait une erreur. « Nos clients ont besoin d'être rassurés sur le plan techniquement, rappelle la DRH de SAP France. Dans les prochaines années, on aura besoin de personnes capables d'apprendre et d'inventer en s'appropriant le raisonnement imposé par les technologies. »

Dans un marché du PGI en mutation, les SSII ont intérêt à développer un large éventail de compétences, réutilisable dans le conseil pur, dans les filières techniques, ou dans les directions fonctionnelles des entreprises. Mais il est bien difficile de couvrir un spectre de plus en plus étendu. L'éditeur reconnaît que, même chez lui, « il n'est pas un seul salarié qui connaisse tout SAP ! »

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