samedi 10 mars 2007

Treat People Right!

Synthèse Managéris n°120b

Commentaire critique
Par Paul Evans,
Professor of Organizational Behavior à l'INSEAD.

Des dirigeants me demandent souvent de leur recommander un livre sur la gestion des ressources humaines. La plupart des universitaires auraient tendance à répondre avec une liste exhaustive de lectures, mais les dirigeants cherchent un livre unique. Ayant recommandé certains ouvrages d'Ed Lawler par le passé (il écrit bien et connaît son affaire), je me suis attelé à la lecture de Treat People Right! pour déterminer s'il s'agit de celui que je recommanderai dans les années à venir.

Après quelques hésitations, le verdict est positif. J'ai longtemps soutenu qu'il y a des cercles vertueux et des cercles vicieux dans l'efficacité organisationnelle, et j'adhère donc tout à fait au propos selon lequel les hommes sont critiques au succès. La démonstration (et les nuances appropriées présentées dans le dernier chapitre) ne convaincra sans doute pas le sceptique invétéré, mais elle dresse un tableau clair et convaincant.

Le chapitre 3, consacré à "ce qui rend les gens efficaces" est censé poser le cadre de l'ouvrage. Sa lecture m'a rendu un peu perplexe. Lawler est reconnu comme une autorité sur le sujet des systèmes de rémunération, fondés sur une approche extrinsèque de la motivation. Dans ce livre destiné à un large public, il construit son raisonnement sur cette théorie, et met à mon sens un accent excessif sur cette forme de motivation. Cela ressemble un peu à l'homme qui cherche sa clé perdue sous le lampadaire : c'est le seul endroit où Lawler voit de la lumière... Ainsi, son analyse de l'équation simple, mais valable, "performance = motivation x compétence" est déséquilibrée. Lawler n'accorde qu'une reconnaissance symbolique à l'importance de facteurs de motivation intrinsèques - le plaisir, la fierté - qui sont tout aussi importants pour la motivation.

La véritable expertise de Lawler porte sur des domaines importants tels que la rémunération, l'organisation du travail et la fixation des objectifs. Les chapitres portant sur ces sujets sont courts, mais d'excellents résumés de l'état de l'art. Dans d'autres domaines où Lawler n'a pas une expérience aussi approfondie - comme le leadership, la conduite du changement ou le développement des compétences - ses arguments sont moins convaincants.

Au fil du livre, un thème central est la fin du "contrat de loyauté", qui fait place à un nouvel ensemble de règles du jeu. Selon Lawler, les entreprises qui y trouveront leur compte sont celles qui parviendront à établir des arrangements d'intérêt réciproque pour l'entreprise et pour l'individu, et qui créeront ainsi un cercle vertueux. Ce raisonnement est valide, même si la réalité est parois plus nuancée que ce que suggère Lawler.

Critiques mises à part, j'ai apprécié dans ce livre la richesse des "meilleures pratiques" présentées sur chaque thème, ainsi que les conseils pertinents formulés à l'attention des individus. On appréciera aussi l'accent mis sur les apports d'applications e-RH. L'ensemble est bien structuré et donnera au lecteur de nombreuses idées applicables tant au niveau personnel qu'organisationnel. Les exemples de l'ouvrage sont presque tous américains, mais je doute que cela gêne les lecteurs, car ils sont tous pertinents.

Lawler écrit bien - clairement, puissamment et simplement. Ce livre n'est pas parfait (mais pour en trouver un parfait, faudrait-il que je l'écrive moi-même ?), mais Treat People Right! est le livre que je recommanderai aux managers et dirigeants à la recherche d'idées pratiques et lisibles sur la gestion des hommes, et cela vraisemblablement pour les quelques années qui viennent.

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